TOME IV

Le monde arabe est, aussi, un condensé des aléas de cette terre bien que ses racines, sa culture, son histoire, sa civilisation soient des freins à une explosion violente. L'entité musulmane est, par contre, plus explosive du fait d'une absence d'homogénéité et d'une certaine décadence, source de miséres, de révoltes, de soumission, d'inculture et de fanatismes. Ces circonstances ont forgé un peuple fier mais marqué par des désillusions et assoiffé de reconnaissance. Il dispose, d'autre part, d'une réserve importante de ressource energétique non renouvelable, indispensable actuellement à la survie de la planéte mais aussi facteur inéluctable de destruction de l'atmosphére et de la vie.
Cet ensemble de facteurs est difficile à mettre en équation ; si elle est difficile à mettre en forme, cette équation est encore beaucoup plus délicate à résoudre. Sa résolution passe, peut être, par une universalisation des conditions d'utilisation de l'énergie non renouvelable, excluant tout totalitarisme venu de l'homme, répondant aux besoins légitimes des peuples et traitant les conséquences néfastes de cet élément énergétique sur l'environnement mondial.

L'Afrique - par une culture associant liberté, insouciance, naïveté au bon sens du terme et concept de vie tribale - développe un individualisme de nation qui lui est trés préjudiciable et le sera à plus long terme pour l'ensemble de l'humanité.
Tant que ces pays se présenteront en ordre dispersé devant la mondialisation, ils seront condamnés à l'exploitation, au pillage de leur ressource, de leur richesse humaine et, par conséquent, à un cataclysme social. Celui-ci, exacerbé par le cataclysme écologique lié au réchauffement climatique, libére - et libérera de plus en plus - un flux migratoire dévastateur pour l'équilibre de la planéte.

La lucidité permet de mesurer un certain nombre de périls qui pésent sur la planéte mais elle ouvre aussi des espoirs de solution à la hauteur des richesses que le destin a offert. La Belle Vie, comme une Belle Fille, n'exprimera tous ses charmes et ses enthousiasmes qu'à la condition d'en être digne.
L'Europe, berceau d'une civilisation, a la possibilité d'être le prince qui réveille la princesse. Il s'agit d'un devoir mais il y va, aussi, de son honneur et de son avenir. Elle peut promouvoir un nouveau contrat de vie basé sur l'Homme et la nécessité de pourvoir à ses besoins. Pour cela, elle doit se libérer de tous les atavismes qu'elle a - en partie - généré et qui font la part belle aux mauvais travers humains, course aux profits, aux honneurs, à l'exploitation. Un monde ayant conscience des limites à respecter, un monde où le matériel - structuré sur le possible et l'impossible - aurait comme limite le politique - structuré sur le légal et l'illégal - lui-même limité par la morale - structuré sur le bien et le mal, un monde qui ferait appel à l'éthique, à l'amour pour se transcender, passe par le Petit Prince perdu sur son astéroïde, par Dom Quichotte toujours prêt - banniére transparente à la main - à promouvoir l'utopie d'une Belle Vie. Y aura-t-il, en Europe, des hommes de bonne conscience, capables de quitter un bien être frileux pour dégager un chemin ouvert, il y a bien longtemps, par les lumiéres.

Une gestion - du monde, du pays, de la vie au quotidien qui placerait l'Homme au centre des préoccupations - n'aurait qu'une loi, la Démocratie. Elle appuyerait sa méthode de raisonnement sur la prise en compte du comment et du pourquoi des problémes et se fixerait trois régles, respecter l'autre et ouvrir la concertation, permettre une synthése ouvrant sur des décisions respectables par tous, mettre en place ces décisions avec volonté et efficacité. Il est étonnant que ce principe de gestion banal, commun, de bon sens se heurte à un mur d'indifférence, d'égoïsme partisan, de mépris aveugle. Avoir l'humilité de prendre en compte les questions qui s'offrent, garder - en toute circonstance - le respect de l'Homme, sont pourtant des valeurs essentielles, qui " ne se discutent pas" et " peuvent toujours se dire", avec ou sans télévision !

Les quelques piéces de monnaies qui ornent l'assiette placée devant Bruno témoignent qu'il n'a - peut être - pas chanté en vain, que des graines ont été semées, qu'elles léveront - sans doute - un jour. Comment pourrait-il en être autrement, dans ce monde fini qui ne pourra pas supporter une croissance infinie.

Un dernier tour de danse et un dernier regard sur le fil rouge de ce Parler Vrai conduisent à constater que le nouveau chef d'orchestre n'a pas pris en compte ces modalités de gestion, cette lecture banale de la gamme de la vie. Il lui a préféré le brillant de l'artificiel, le clinquant du paraître, le fragile du virtuel, l'aléatoire de l'impulsif mais la qualité du bal fourni risque, rapidement, de souffrir d'une inadaptation.
Dans un cadre dévasté, avec une moitié seulement de l'orchestre, le chef de musique peut difficilement offrir une belle soirée, quelquesoit les agitations de son bâton ; il est même possible que le concert plonge dans une cacophonie et la désolation.

Le retour à un ancien rayonnement, la persistance de l'impact socio-culturel que l'histoire a donné à ce pays, le maintien des valeurs révolutionnaires dont il est un symbole dans le monde entier, imposent que cette nation retrouve la crédibilité et la brillance qu'un laisser aller et une pensée unique ont souillé. La condition fondamentale, pour qu'elle récupére sa place dans la diversité de l'univers, est liée à un arrêt de sa course folle dans le laxisme d'une conception libérale débridée et à un retour au bon sens populaire.
En d'autres termes, le Politique doit reprendre sa prééminence sur l'économie en retrouvant sérieux et sérénité. Ainsi la course aux rentes de situation et aux avantages acquis cessera, l'argent ira moins à l'argent, les mirages du virtuel disparaîtront au profit du vrai et l'Homme retrouvera sa place au centre des préoccupations.
La condition fondamentale à cette condition fondamentale est la réapparition des deux piliers qui font la démocratie. Le 3A est - peut être - de retour, reste le 3P ( paix, progrés et partage ). Son retour n'est pas encore programmé ... mais cette derniére campagne présidentielle peut le permettre.

L'action conjuguée de Bécassine et de Monsieur Agité, devenu Président, un peu lapin et adepte d'ouverture - en confirmant l'implosion d'un mouvement de pensée - ouvre vers une reconstruction saine de ce pilier.
L'état de ruine de ce courant d'opinion permet d'espérer qu'il retrouve, au sein des décombres, ses fondations originelles. Débarassé des travers de l'ambition personnelle comme des pesanteurs d'une pensée unique, il s'ouvrira à un projet pourvu de potentialités et constituera, ainsi, le pilier qui fait défaut actuellement. Du temps, du courage, des déceptions sans doute, sont inéluctables dans cette traversée du désert mais ce ne sont que de simples aléas par rapport à l'histoire et - plus encore - par rapport à la fonction que ce courant doit exercer dans le devenir du pays. Tendu entre deux piliers solidement ancrés, le fil de la vie pourra, de nouveau, soutenir efficacement tous les secteurs qui font une nation saine.

L'heure arrive.
Monsieur le tavernier, un balais à la main, pousse les tables ; les badauts qui - un instant - ont accordé de l'intérêt à Bruno sont retournés au chaud " du chacun pour soi et Dieu pour tous ". Le chanteur abandonné, sa guitare sous le bras et sa chanson en bandouliére, se léve et part dans la nuit à la recherche du Petit Prince. Il est persuadé que l'univers, la vie, le destin font partie d'un processus ayant un sens, voire un but mais qu'il est nécessaire de bousculer le visible de la réalité et de renforcer la convergence entre transcendance et raison pour l'atteindre. Son intuition est confortée par les découvertes du monde scientifique, notamment les vérités ouvertes par le systéme quantique. En multipliant les niveaux de réalités et les niveaux de perception, celui rend - sinon probable - au moins possible que l'Homme ne soit pas uniquement un assemblage de molécules. Il n'est pas seul dans l'immensité indifférente de l'univers d'où il a émergé par hasard ( Jacques Monod ) mais participe à quelquechose qui le dépasse et qui a un sens. Il mérite, par conséquent, respect et soutien dans sa démarche hésitante et inconnue vers le merveilleux de la vie. Un paradigme global, prenant en compte le sens fondamental de l'univers, viendra - un jour -bouleverser notre vision des faits et des connaissances.

D'ores et déjà, le fait que les données rationnelles de la science ne permettent pas d'écarter cette hypothése fixe un axe de conduite dans la vie. Le plus important n'est pas la lutte pour la conquête du pouvoir ou des richesses matérielles qui se situe dans les limites du possible et de l'impossible, ni l'obtention de ce pouvoir car elle reste limitée au légal et à l'illégal, ni même le combat pour une répartition égale de la richesse qui fait intervenir les notions de bien et de mal, mais le développement de notre esprit pour mieux se comprendre, mieux comprendre le monde, mieux comprendre l'Homme et se transcender vers l'éthique, l'amour. Ce développement de l'esprit est essentiel pour échapper au statut réducteur de "l'homo économicus", noyé dans les jeux vidéo, le virtuel, les informations fallacieuses de la médiacratie et atteindre la Belle Vie.

Un parler vrai sur une utopie approche la nature humaine dans ses vérités. Cette plongée vers une recherche du sens de l'univers, de l'existence apporte espoir et réconfort dans une démarche incertaine vers la Belle Vie. Au long de ce chemin, un élément apparait important, la raison. Elle permet de concevoir l'avenir et d'en tenir compte pour orienter le présent ; sans elle, la branche Homo des primates aurait subi passivement son destin et n'aurait - sans doute - été qu'une impasse, comme tant d'autres dans l'histoire de l'évolution.
Si la réflexion est un élément essentiel afin de profiter des milliards d'années qu'offrent encore le destin, elle ne suffit pas pour caractériser l'Homme. Dans ses composants, il faut tenir compte d'un élément impalpable, impossible à définir comme à mesurer, l'âme et les sentiments qui l'accompagnent. Leur place est majeure dans l'évolution de l'espéce, avant même l'intelligence et cela dés la nuit des temps. En effet, dans la chaîne de l'évolution, il y a sans doute moins d'un milliard d'années, les sentiments - ou leurs ancêtres de l'époque - ont transformé un processus de reproduction par duplication en un processus de différenciation par procréation. L'acte qui permet à deux êtres de s'associer pour un produire un troisiéme a été fondamental pour introduire la diversité et la pérennité de l'espéce.
Les sentiments ont fait de ce geste un acte d'amour ou, à l'inverse, il est possible que cela soit ce geste qui ait ouvert la porte des sentiments. Peu importe, la diversité née de cette association a donné l'Homme dans toute sa richesse et toute sa démesure, avec sa raison et sa sensibilité, sa capacité à réfléchir et à aimer. Ces éléments - fondateurs de la vie, de la Belle Vie - sont complémentaires, sans doute indissociables et, à coup sûr, jamais concurrents.

L'amour - que la raison ignore - et la raison - qui, parfois, s'oppose à l'amour - ont ouvert ce parler vrai ; ils en seront aussi la conclusion, témoignant du lien qui unit ces deux tomes. Le premier est intimiste, le second ouvre sur la vie mais les deux ont la même démarche, la même quête du sens de l'existence.

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